On a vu Dom Juan

C’est un Dom Juan lumineux que Marcel Maréchal est venu livrer à la MC93 de Bobigny. Il met en scène le duo Dom Juan-Sganarelle qu’il interprète avec Pierre Arditi dans le rôle-titre. Des retrouvailles avec le Sganarelle qu’il a joué 20 ans plus tôt aux cotés de Gérard Guillaumat sous la direction de Patrice Chéreau. 20 ans qui ont permis de cheminer et de proposer un Dom Juan ou le couple qu’il forme avec Sganarelle éclaire véritablement la pièce. Alors que Pierre Arditi clame haut et fort sa soif de liberté, son irrespect pour les conventions qui l’empêcheraient de faire comme son plaisir le dicte et son mépris pour les autres, à commencer par Elvire, il suffit de voir le regard de Marcel Maréchal pour comprendre que leur relation est au cœur de la pièce. Un regard d’abord scandalisé tout d’abord qui laisse apparaitre une certaine admiration. Un détail à peine perceptible sur la grande scène de la MC93 qui donne une clef pour comprendre comment ce couple fonctionne, comment Dom Juan n’existerait pas sans Sganarelle tout comme Sganarelle n’aurait pas de consistance sans son Dom Juan. Un regard qui invite à considérer Sganarelle comme le centre de gravité de la tragi-comédie. Un regard qui va mettre en perspective l’assurance affichée par Dom Juan, allant de la fascination exercée par un maitre flamboyant à la compassion d’une mère face au destin tragique d’un enfant turbulent qui ne respecte même pas la statue du commandeur. Et la pièce se met à nous parler.