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Corinne Mathou

Corinne Mathou fait bouger les frontières du théâtre

Danseuse, comédienne et metteur en scène, Corinne Mathou associe ses pratiques, la culture indienne et la musique pour une création d’un spectacle choral.

Corinne Mathou fait bouger les frontières du théâtre/ Stéphane Boularand (c)Bigorre.org

Corinne Mathou fait bouger les frontières du théâtre/ Stéphane Boularand (c)Bigorre.org

Le Roméo et Juliette qu’elle a mis en scène cet été pour le Festival de Gavarnie a braqué les projecteurs sur elle. Corinne Mathou a livré au public du plateau de La Courade un théâtre qui refuse les frontières du genre. Un théâtre qui sort de l’entre-soi pour aller chercher des musiciens, des circassiens, des danseurs de hip-hop et des danseurs contemporains pour une expression chorale qui se mêle aux mots de Shakespeare. Et elle ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Corinne Mathou nous a reçu pour parler de son parcours et de ses projets.

Vous avez commencé avec Mercedes Tormo. C’est ce théâtre qui vous a amené en Inde ?

Oui complètement ! J’étais en option théâtre au lycée Marie-Curie avec Mercé. Ses cours étaient vraiment fantastiques. Elle avait fait venir Nathalie Le Boucher, une ancienne élève partie étudier le kathakali en Inde. Une rencontre avec un théâtre physique, un travail des émotions, des yeux qui allait à l’encontre du cloisonnement qu’on a en France depuis un siecle alors que c’était des arts mélangés dans la Commedia dell’arte et dans Molière. Des formes que j’ai retrouvé par le biais du kathakali et des stages de Comedia dell’arte avec Mercé. Je sentais déjà qu’il y avait quelque chose dans lequel j’étais beaucoup plus à l’aise que du texte pur.

Et l’Inde est arrivée comment ?

Après Marie-Curie, nous étions trois à aller à la fac à Bordeaux en formation de formateurs au métier du théâtre avec Georges Bigot, ancien comédien du Théâtre du Soleil. Un choc de travail avec Georges qui était un super directeur d’acteurs. Et encore des formes asiatiques, le kathakali mais aussi les formes balinaises. Après je me suis inscrite en licence et je suis partie en Inde pour une année à apprendre le kathakali.

Vous partez pour une année et vous y restez près de 20 ans !

Oui, j’ai découvert d’autres formes d’art et je suis resté en continuant mon parcours universitaire. Ca a été d’abord physique parce que l’acteur on doit se former avec un travail de training très intense. Des exercices des yeux, des exercices pour assouplir les jambes, les pieds, les mains et tout corps. C’était très intense mais je me suis vraiment retrouvée. Après c’est à Bengalore que j’ai commencé à me confronter au travail de création et à rencontrer des compagnies contemporaines.

Comment retrouvez-vous le théâtre quand vous revenez en 2018 ?

Je me suis rendu compte qu’il y avait une rupture. Notre société refuse la beauté, les choses un peu grandioses, la couleur. Le théâtre ou les formes artistiques sont le reflet de ce monde. Sans plaquer ce que j’ai fait en Inde, je cherche une articulation entre théâtre, danse et musique sans être illustratif ni redondant. En Inde, il y a des moments où l’acteur improvise et les musiciens sont la pour ponctuer l’action dramatique. C’est ce qui m’intéresse, comment la musique et la danse peuvent créer une ambiance pour ponctuer et renforcer la tragédie. Mais ici, c’est difficile de ne pas correspondre à une étiquette. On est danseur, comédien ou musicien.

Tout ce qu’on retrouve dans votre Roméo et Juliette à Gavarnie !

J’arrive à 40 ans et ça me suffit plus d’être interprète. J’ai un regard sur le monde, je cherche à construire une esthétique qui allie le fond et la forme. J’avais déjà commencé avec Arise que j’ai présenté au Parvis en 2019. Et j’ai monté Roméo et Juliette dans cet esprit.

Pour voir les spectacles de Corinne Mathou

Avec la compagnie de La Mandragore qu’elle a fondé en revenant en Hautes-Pyrénées, Corinne Mathou multiplie les projets. Celui de permettre à Arise de dépasser la COVID qui a coupé court à sa carrière. En commençant par une représentation le 20 octobre à la Maison des Arts de Pessac. Il faudra attendre un peu plus pour L’Enfant et les Sortilèges d’après Colette, sans Ravel mais avec des morceaux de Max Richter qui sera présenté au printemps prochain. Enfin, dans les cartons, une adaptation transportable du Roméo et Juliette monté cet été pour le Festival de Gavarnie.

Propos recueillis par / ©Bigorre.org / publié le

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