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Jacques Brianti (Pouzac)

Jacques Brianti, artiste prolifique et sans frontières

Rencontre avec l’artiste bagnérais au moment ou il range, classe et organise une production qui témoigne de sa curiosité, de son évolution et d’une personnalité sans complaisance.

Jacques Brianti/ Stéphane Boularand (c)Bigorre.org

Jacques Brianti/ Stéphane Boularand (c)Bigorre.org

Rencontrer Jacques Brianti est une expérience certainement inoubliable. En nous ouvrant la porte de son atelier, à Pouzac, on découvre l’antre de l’artiste peuplée de souvenirs d’expositions, de rencontre avec d’autres artistes, d’oeuvres grand format accrochées aux murs, de corps nus rangées ou laissées en vrac. Un véritable dédale dans lequel on a autant de mal à suivre le propos de Jacques Brianti que sa progression au fil des couloirs et des escaliers. Suivons l’artiste dans une interview qui se construit progressivement, livrée expurgée des digressions incursives et récursives, qu’elles soient politiques, fiscales ou médicales.

Merci de m’accueillir dans votre atelier !

L’atelier c’est un lieu où l’arbitraire règne complètement. On voit ce qu’il y a dans l’atelier comme il est à ce moment. Des toiles rangées, des toiles accrochées que j’ai eu la feignantise de décrocher. Cette maison n’avait pas d’atelier, on a construit ça sur place pour ranger tout ce que j’avais dans le moulin à Ordizan ou j’ai travaillé pendant 35 ans. Et ça s’avère trop petit parce que je continue à produire.

Autour de nous il y a des centaines d’œuvres. Vous avez une impressionnante production !

C’est ce qui se dit. Par mes détracteurs en particulier. Le trop produit est pris comme une dévaluation. Tout créateur produit. Si je ne peignais que des fleurs de printemps je travaillerais une saison par an. Mais je ne fonctionne pas comme ça. Une vie c’est un fleuve. On part à la source, on rencontre des terrains différents, on construit. Certains s’arrête par peur de se noyer, pas moi, je bouillonne. Les gens qui voient ma production ne savent pas par quel bout me prendre. Je suis dans un mouvement que je nomme Inexistant. Roland Barthes disait qu’être dans le contemporain c’est être dans l’inactuel. Je me suis dit que je pouvais me l’approprier.

Qu’en faites-vous ?

Que dalle, mais ca me conforte dans mon positionnement !

Vous avez commencé par quoi ?

La première chose à faire c’est la décision d’être dans ce métier. J’étais prof, j’étais en cours de titularisation et je suis parti parce que sinon, je serais devenu peintre du dimanche.

Et ensuite ?

Ensuite, du jour au lendemain on n’a plus de salaire et il faut apprendre à se vendre et avoir des commandes. J’ai fait des commandes publiques. Comme j’avais été élu, je savais comment ça fonctionnait, les dossiers qu’il fallait faire, comment les décisions étaient prises, comment ça se passe après la décision. J’ai eu une première commande publique à Aureilhan. Après Il y a le monument du Mirail à Toulouse qui a déchainé les réactions pour et contre. Des personnages en résine perché sur des hauteurs. Et un jour un directeur des services a pris tout seul la décision de massacrer le monument. J’aurais dû faire un procès, c’était sur un plateau pour gagner. Mais je ne l’ai pas fait. J’ai fait 30 commandes publiques en 30 ans. Et j’ai exposé dans toute l’Europe et au-delà, de Mexico à la Slovaquie, la Tchéquie, l’Allemagne ou la Belgique.

Quel sens donnez-vous aux corps dénudés sont très présents dans votre production ?

C’est mon plaisir et c’est ma guerre. Je me sert du corps comme un moyen d’expression. Mais il n’y a pas que les corps. Il y aussi l’emballage qui est récurrent. Le dindon aussi après une expédition au Mexique ou je racontais la prise du pays par les Espagnols au travers de cet animal emblématique. La tauromachie est aussi présente avec le rapport fascinant de la peur et de la mort. Et il y a les frontières.

Quel regard sur votre production ?

J’en suis au niveau des bilans, je range, je classe. Et j’ai envie de reprendre des choses que j’avais laissé, j’ai pour projet de continuer un projet que j’ai commencé il y a 30 ans. Le thème c’est le voyage, les frontières. Ca a commencé avec Progetto, voyage à Pontormo à Florence et aux Augustins à Toulouse. 30 ans plus tard c’est Logeons, longeons les frontières au Parlement Européen à Strasbourg à l’invitation de Marie-Pierre Vieu. J’expose quelques une de ces oeuvre au tiers-lieu de Bagnères jusqu’à juin.

Propos recueillis par / ©Bigorre.org / publié le

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