Nous avons interrogé Emmanuel Macron (EM) qui candidate aux élections présidentielles sur son projet de politique culturelle.
Questions aux candidats aux élections présidentielles
Votre regard sur de la politique culturelle conduite par le Président de la République François Hollande et des Ministres de la culture de ses gouvernements :
- Est-ce que les objectifs affichés du candidat Hollande ont été atteints ?
- Bilan et critique des initiatives conduites et du soutien aux structures actives.
- L’action envers les plus jeunes, dans le cadre scolaire en particulier.
- Est-ce que la part du budget consacré à la culture est suffisante ?
- Est-elle bien utilisée ?
- Loi Hadopi : que pensez-vous des usages et de la protection des oeuvres ?
- Le rayonnement culturel de la France est-il suffisant ?
Votre projet culture :
- Voudriez-vous conduire un projet dans la continuité ou en rupture avec l’action passée ?
- Quelles évolutions ou même révolutions tant au niveau artistique qu’économique voudriez-vous impulser ?
- Faut-il et doit-on dépenser plus dans ce domaine ?
- Quel statut pour les professionnels, intermittents du spectacle ?
Réponse de Emmanuel Macron (EM)
Réponse partielle à nos questions
La culture définit ce que nous sommes.
Elle construit un langage commun et permet de sortir des assignations à résidence que créent les origines sociales. C’est pourquoi notre projet est culturel : c’est un projet d’émancipation, une réponse aux barrières invisibles que crée la société.
Notre culture, et la langue française qui en est la matrice, sont une source de rayonnement international.
Notre pays est réputé pour ses monuments, ses institutions culturelles, la vitalité de sa création, ses festivals, ses filières d’excellence. La France a su bâtir une politique culturelle aux résultats remarquables. Le soutien au cinéma ou le prix unique du livre sont des références.
Mais ce modèle trouve aujourd’hui ses limites.
Le rayonnement international de notre vie artistique s’essouffle. Des déserts culturels subsistent en France. Trop de citoyens n'ont pas accès à la culture. Quant à la transformation numérique, si elle facilite l’accès aux œuvres et aux « contenus », elle bouleverse le secteur de la création et des médias et fragilise l’édifice patiemment construit pour soutenir la création artistique et la diversité culturelle.
Nous donnerons une nouvelle impulsion à la politique culturelle. Le rôle de l’État, intimement associé à celui des collectivités locales, est déterminant pour retisser les liens que nous voyons se rompre jour après jour.
PROPOSITIONS
Objectif 1 : Donner le goût de la culture
Aujourd’hui, moins d’un enfant sur deux a accès aux actions d’éducation artistique et culturelle. C’est pourtant dans les premières années de la vie que se crée le désir de culture.
Demain, la priorité du quinquennat en la matière sera d’ouvrir l’accès à la culture et aux pratiques artistiques dès le plus jeune âge et de prolonger cet effort vers les jeunes et les familles.
« Nous devons donner accès à la culture littéraire, philosophique et historique grâce à des accès à des librairies, aux bibliothèques… »
– Sam, Bondues - La Grande Marche
100% des enfants auront accès aux actions d’éducation artistique et culturelle.
Les projets d’initiation à la pratique artistique collective (orchestres, chorales, troupes de théâtre) ou de rencontre avec des œuvres et des artistes seront encouragés.
Ouvrir les bibliothèques le soir et le dimanche.
Les bibliothèques sont ouvertes 41h par semaine dans les grandes villes de France, contre 98h à Copenhague. C’est une inégalité fondamentale : ce sont ceux qui n’ont pas accès, chez eux, à la lecture ou à une activité culturelle, qui en pâtissent le plus. Dans une logique de contractualisation avec les collectivités locales, l’État prendra à sa charge les dépenses supplémentaires liées à l’ouverture en soirée et le dimanche des bibliothèques municipales et poursuivra le plan de mobilisation en direction des bibliothèques universitaires.
Créer un Pass Culture de 500 € pour tous les jeunes de 18 ans, qui leur permettra, via une application, d’accéder aux activités culturelles de leur choix : musée, théâtre, cinéma, concert, livres ou musique enregistrée. Il sera cofinancé par les distributeurs et les grandes plateformes numériques, qui bénéficieront du dispositif.
Objectif 2 : Réinventer la politique culturelle
Aujourd’hui, la révolution numérique bouleverse la donne. Les grands musées et les grands établissements culturels sont autonomes. Les collectivités locales jouent un rôle croissant dans l’animation de la vie culturelle. L’État doit repenser ses missions et ses modes d’action.
Demain, l’État sera plus agile, plus innovant et plus stratège. La politique culturelle devra s’adapter à la réalité numérique, s’ancrer davantage sur le terrain et s’ouvrir à la diversité.
Professionnaliser et ouvrir les nominations dans le secteur culturel afin qu’elles reflètent la diversité de la société.
Les femmes représentent plus de la moitié des étudiants en spectacle vivant, mais seulement 12 % des directeurs de théâtres nationaux. La parité doit devenir la règle pour que davantage de femmes dirigent des institutions culturelles - et notamment les plus grandes.
Maintenir l’effort financier de l’État en faveur de la culture, en contrepartie d’une exigence d’efficacité : toutes les politiques publiques en faveur de la culture seront évaluées.
Le soutien au mécénat sera conforté et l’exonération des œuvres d’art de l’assiette de l’ISF sera maintenue.
Regrouper les forces à l’international.
L’influence de la France dans le monde passe d’abord par son image culturelle et le soutien à la francophonie. La rationalisation et le renforcement d’institutions aujourd’hui dispersés permettra de valoriser à l’étranger le savoir-faire de nos établissements, de nos industries culturelles et des acteurs privés.
Objectif 3 : Soutenir les artistes et la création
Aujourd’hui, l’offre de spectacles et de biens culturels est abondante et sa diffusion bénéficie des effets démultiplicateurs permis par le numérique.
Demain, nous ferons évoluer le modèle de soutien à la création pour qu’il réponde à la nécessité de préserver la diversité culturelle dans un monde qui change.
Favoriser la diffusion du spectacle vivant notamment en multipliant les spectacles coproduits et adapter le soutien au cinéma et à l’audiovisuel aux nouveaux formats.
Pérenniser et adapter le statut d’intermittent du spectacle, qui est un outil au service de la politique culturelle ; revoir la formation initiale des artistes par l’interdisciplinarité, les troncs communs entre écoles d’art, la mobilité internationale.
Investir dans les industries créatives et culturelles françaises en créant un fonds d’investissement dédié de 200 millions d’euros.
Objectif 4 : Redonner du sens à l’idéal européen
Aujourd’hui, les citoyens européens n’ont pas le sentiment de faire partie d’une même communauté.
Demain, nous ferons de la culture un enjeu prioritaire de la refondation de l’Europe.
Lancer un Erasmus des professionnels de la culture pour favoriser la circulation des artistes, des commissaires d’exposition et des conservateurs.
Généraliser le Pass Culture au niveau européen.
Créer les conditions de l’émergence d’un « Netflix européen » exposant le meilleur du cinéma et des séries européennes
Objectif 5 : Défendre un meilleur partage de la valeur, au profit des créateurs
Aujourd’hui, la transformation numérique a fait évoluer le partage de la valeur vers les grandes plateformes numériques, au détriment des artistes et des créateurs. Cela fragilise la création dans sa diversité.
Demain, nous mènerons le combat à l’échelle européenne pour que les artistes, les créateurs et les producteurs reçoivent une juste rémunération.
Rétablir une concurrence équitable avec les grands acteurs numériques pour qu’ils payent leurs impôts comme tous les autres acteurs économiques et qu’ils soient soumis aux mêmes obligations, dans les pays où les œuvres sont diffusées.
Défendre résolument les droits d’auteur, aider les artistes et les éditeurs de contenu européens par la négociation encadrée d’accords sur leur rémunération, étendre les droits voisins aux éditeurs de presse et renforcer l’action contre les sites pirates.
Objectif 6 : Promouvoir un patrimoine vivant
Les Français sont attachés à leur patrimoine et conscients de l’extraordinaire richesse de cet héritage commun. Facteur de développement économique et d’attractivité des territoires, le patrimoine mérite d’être entretenu et mieux valorisé.
« La France possède un très grand patrimoine culturel et des hauts lieux de culture qui permettent un enrichissement culturel permanent. C'est pour moi une très grande source d'espoir. »
– Gladys, Saint-Maur-des-Fossés – La Grande Marche
Rénover et mieux valoriser le patrimoine grâce à une dotation dont l’utilisation sera conditionnée à des projets éducatifs, artistiques ou touristiques.
Objectif 7 : Protéger l’indépendance éditoriale des médias d’information et conforter les médias de service public.
Aujourd’hui, la présence d’actionnaires industriels et financiers au capital de groupes de presse est une réponse aux difficultés économiques de la presse. Mais elle est source de soupçons sur la réalité de l’indépendance des rédactions et la liberté de la presse. Quant au secteur de l’audiovisuel, sa réglementation n’est plus adaptée à un environnement ouvert et concurrentiel.
Demain, nous garantirons l’indépendance éditoriale des médias d’information et faciliterons leur migration numérique. À l’heure de la fragmentation des médias, les médias publics doivent incarner une exigence éditoriale d’impartialité et de qualité de l’information, jouer un rôle culturel et de soutien à la création, et fédérer les publics les plus larges. Nous ferons évoluer l’organisation, le fonctionnement et la gouvernance des médias de service public.
Créer un nouveau statut de l’entreprise de presse, sur le modèle des trusts anglo-saxons pour garantir l’indépendance éditoriale et journalistique.
Simplifier la réglementation audiovisuelle en matière de publicité, de financement et de diffusion, pour lever les freins à la croissance de la production et de la diffusion audiovisuelles et préparer le basculement numérique, tout en préservant la diversité culturelle.
Nous renforcerons le secteur public de l’audiovisuel pour qu’il réponde aux attentes de tous les Français et accélère sa transformation numérique, en concentrant les moyens sur des chaînes moins nombreuses mais pleinement dédiées à leur mission de service public.
Nous rapprochons les sociétés audiovisuelles publiques pour une plus grande efficacité et une meilleure adéquation entre le périmètre des chaînes et leurs missions de service public. Leurs conseils d’administration seront plus indépendants et plus ouverts dans sa composition. Ils seront chargés de designer les dirigeants, après appel public à candidatures.
Réponse publiée le sábado, 21 de diciembre de 2024